TRISSOTINS ET TRISSOTINES, COMMENT SE FAIT-CE ?
Sans briguer le poste de Premier ministre, il devient nécessaire de reprendre trissotins et trissotines qui s’affichent, dans leur genre, bien mal culottés, élucubrant à qui mieux-mieux, entre confusion des genres et écriture inclusive.
Le Bescherelle (déjà cité sur ce blog) traite des adjectifs avec plusieurs substantifs de différents genres dans son article CXV (115), p. 206-207).
Voyons quelques exemples choisis parmi d’autres :
L’orgueil aveugle se suppose une grandeur et un mérite démesurés. (Ségur)
Dans la Laponie, la ronce, le genièvre et la mousse font seuls la verdure de l’été. (Buffon)
C’est sur la naissance que sont fondés les prérogatives et les respects accordés aux castes nobles et religieuses de l’Asie et de l’Europe. (Bernardin de Saint-Pierre)
L’ordre et l’utilité publics ne peuvent être le fruit du crime. (Massillon)
Il ne faut pas prendre pour des vertus des actions et des intérêts arrangés avec industrie. (Massias)
Ainsi, comme l’explique le texte original : « Ces exemples nous prouvent assez que, quand il y a plusieurs substantifs de différents genres, l’adjectif se met au masculin pluriel, que cet adjectif précède ou suive immédiatement les substantifs exprimés, ou qu’il en soit séparé par un verbe. »
L’ironie voulant toujours sa part, les deux derniers exemples choisis sont plus que contemporains, pour peu qu’on en spécifie le champ :
L’ordre et l’utilité publics ne peuvent être le fruit du crime… surtout contre la bonne langue française et sa grammaire.
Quant aux « actions et intérêts arrangés avec industrie » on n’a aucune peine à les deviner, puisque trissotins et trissotines, parés de quelques prétextes grammaticaux en guise de cache-sexes, ne tendent qu’à les exhiber à tout bout de champ… lexical ou autre… sans que nous soyons dupes de leurs… arrière-pensées.
Pour qui a du temps à perdre, il suffit de les entendre.
TRISSOTINS ET TRISSOTINES JUSQU’À PLUS SOIF !
D’autres, s’inventant médiateurs, croient promouvoir une nouvelle règle : modifier l’ordre des substantifs pour créer un accord adéquat de l’adjectif final.
Ah ! Ces braves gars (.es ?) – pardonnez l’inclusion trop tentante – qui se croient novateurs, auraient mieux fait de revenir au Bescherelle, et à la suite de ses explications.
« L’euphonie exige [l’euphonie… entendons bien !] que l’on énonce quelquefois [la nuance est d’importance] le substantif masculin après le féminin, quand l’adjectif n’a pas la même terminaison pour les deux genres.
Ainsi, l’on dira Cet acteur joue avec une noblesse et un goût parfaits, plutôt que : avec un goût et une noblesse parfaits, parce que, dans cette dernière construction, la rencontre du substantif féminin noblesse et de l’adjectif masculin parfaits est à la fois dure et désagréable. »
Il s’agit en fait de la bonne interprétation de ce subtil équilibre nécessaire entre l’écrit et l’oral, garant de la bonne utilisation d’une grammaire, aussi nécessairement rigide dans ses généralités, que souple dans ses cas spécifiques.
Sauf que… la souplesse n’est pas la qualité dominante des trissotines et trissotins, acharnés à leurs plus que triples trissotineries.
Mieux vaut revenir au Bescherelle qui propose donc des contre-exemples, par honnêteté ainsi que souci d’enseignement par les cas limites (« exige parfois… ») :
« Cependant les auteurs ne se sont pas toujours astreints à cette règle ; Buffon a dit : En Égypte, les jeunes filles de la campagne ont les bras et les jambes bien faits, et Massillon : l’ordre et l’utilité publics, etc. »
Sur ces derniers exemples, il y aurait à penser et à dire, mais, point trop n’en faut.
Attendons la suite.